Sarkozy dégaine les clichés et cible les immigrés
Le Président a établi un parallèle hasardeux entre délinquance et immigration, vendredi à Grenoble, proposant de retirer la nationalité française aux «truands» d’origine étrangère.
Vendredi à Grenoble, le chef de l’Etat a, pour la première fois de son mandat, explicitement lié délinquance et immigration en évoquant «cinquante ans d’immigration insuffisamment régulée qui ont abouti à mettre en échec l’intégration». Et souhaité que la nationalité française soit retirée à certains délinquants d’origine étrangère. Des propos que l’on n’avait pas l’habitude d’entendre dans la bouche d’un homme se prévalant jusqu’alors de ses racines hongroises et qui avait mis fin à la double peine pour les étrangers.
«Guerre». C’était pourtant, à l’origine, un discours destiné à remotiver les forces de l’ordre qui était attendu. Sarkozy venait à Grenoble mettre en place le nouveau préfet, Eric Le Douaron, haut gradé de la police, après avoir débarqué son prédécesseur, jugé responsable des émeutes du quartier de la Villeneuve, il y a dix jours, suite à la mort d’un braqueur de casino. Et les policiers espéraient une réaction énergique de sa part, après que certains de leurs collègues grenoblois, ayant fait l’objet de menaces, eurent demandé leur mutation.
Le programme était avant tout axé sur cette thématique. A 11 heures, Sarkozy est à l’hôtel de police de Grenoble pour voir la hiérarchie et les syndicats. A 12 h 30, il tient à la préfecture une réunion de «lutte contre l’insécurité». Aucune des deux rencontres n’est ouverte à la presse. Puis, vers 13 heures, vient le discours. Cela commence par un laïus classique sur les «voyous», les «truands» contre qui il faut mener «une véritable guerre» et les policiers qui n’ont fait «que leur devoir» en tuant un braqueur. La Seine-Saint-Denis est citée en exemple : là aussi, un préfet ancien policier a été mis en place. Et le Président de s’en prendre à «l’angélisme» de la gauche.
Devant le maire de Grenoble, Michel Destot (PS), qui avait émis l’idée d’organiser un «Grenelle de la sécurité», il répond, faussement ouvert, «pourquoi pas ?», pour ajouter aussitôt : «On a tiré à balles réelles sur les policiers. Si j’avais répondu "on organise un colloque", qui m’aurait pris au sérieux ?» Le Président fait ensuite la liste des solutions destinées à combattre la délinquance : celles déjà prises (loi antibandes, suspension des allocations familiales) et celles à mener (extension des peines planchers aux auteurs de violences aggravées, réforme du droit pénal pour les mineurs). C’est dans ce cadre qu’interviennent les mesures visant les immigrés et leurs enfants : «La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d’origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d’un policier, d’un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l’autorité publique.» Et de compléter la mesure vis-à-vis des jeunes, en émettant le souhait que «l’acquisition de la nationalité française par un mineur délinquant ne soit plus automatique au moment de sa majorité».
Cliché. Quelques instants après, le Président explique sa philosophie : «Il y a un problème de transmission des valeurs de la culture française» pour les «arrivants dans notre pays», mais aussi pour les deuxièmes ou troisièmes générations qui se «sentent moins français[es] que leurs parents ou leurs grands-parents». Et d’avancer la solution : «Il faut impérativement maîtriser le flux migratoire.» Et de citer la première partie de la célèbre phrase de Michel Rocard sur la «misère du monde» que la France ne peut pas accueillir.
Pour finir en beauté, il en rajoute dans le cliché de l’immigré fraudeur, en déclarant souhaiter qu’on évalue les «droits et prestations auxquels ont aujourd’hui accès les étrangers en situation irrégulière». Car, assure le président de République, une «situation irrégulière ne peut conférer plus de droits qu’une situation régulière».
http://www.liberation.fr/politiques/0101649832-sarkozy-degaine-les-cliches-et-cible-les-immigres
Le Président a établi un parallèle hasardeux entre délinquance et immigration, vendredi à Grenoble, proposant de retirer la nationalité française aux «truands» d’origine étrangère.
Vendredi à Grenoble, le chef de l’Etat a, pour la première fois de son mandat, explicitement lié délinquance et immigration en évoquant «cinquante ans d’immigration insuffisamment régulée qui ont abouti à mettre en échec l’intégration». Et souhaité que la nationalité française soit retirée à certains délinquants d’origine étrangère. Des propos que l’on n’avait pas l’habitude d’entendre dans la bouche d’un homme se prévalant jusqu’alors de ses racines hongroises et qui avait mis fin à la double peine pour les étrangers.
«Guerre». C’était pourtant, à l’origine, un discours destiné à remotiver les forces de l’ordre qui était attendu. Sarkozy venait à Grenoble mettre en place le nouveau préfet, Eric Le Douaron, haut gradé de la police, après avoir débarqué son prédécesseur, jugé responsable des émeutes du quartier de la Villeneuve, il y a dix jours, suite à la mort d’un braqueur de casino. Et les policiers espéraient une réaction énergique de sa part, après que certains de leurs collègues grenoblois, ayant fait l’objet de menaces, eurent demandé leur mutation.
Le programme était avant tout axé sur cette thématique. A 11 heures, Sarkozy est à l’hôtel de police de Grenoble pour voir la hiérarchie et les syndicats. A 12 h 30, il tient à la préfecture une réunion de «lutte contre l’insécurité». Aucune des deux rencontres n’est ouverte à la presse. Puis, vers 13 heures, vient le discours. Cela commence par un laïus classique sur les «voyous», les «truands» contre qui il faut mener «une véritable guerre» et les policiers qui n’ont fait «que leur devoir» en tuant un braqueur. La Seine-Saint-Denis est citée en exemple : là aussi, un préfet ancien policier a été mis en place. Et le Président de s’en prendre à «l’angélisme» de la gauche.
Devant le maire de Grenoble, Michel Destot (PS), qui avait émis l’idée d’organiser un «Grenelle de la sécurité», il répond, faussement ouvert, «pourquoi pas ?», pour ajouter aussitôt : «On a tiré à balles réelles sur les policiers. Si j’avais répondu "on organise un colloque", qui m’aurait pris au sérieux ?» Le Président fait ensuite la liste des solutions destinées à combattre la délinquance : celles déjà prises (loi antibandes, suspension des allocations familiales) et celles à mener (extension des peines planchers aux auteurs de violences aggravées, réforme du droit pénal pour les mineurs). C’est dans ce cadre qu’interviennent les mesures visant les immigrés et leurs enfants : «La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d’origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d’un policier, d’un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l’autorité publique.» Et de compléter la mesure vis-à-vis des jeunes, en émettant le souhait que «l’acquisition de la nationalité française par un mineur délinquant ne soit plus automatique au moment de sa majorité».
Cliché. Quelques instants après, le Président explique sa philosophie : «Il y a un problème de transmission des valeurs de la culture française» pour les «arrivants dans notre pays», mais aussi pour les deuxièmes ou troisièmes générations qui se «sentent moins français[es] que leurs parents ou leurs grands-parents». Et d’avancer la solution : «Il faut impérativement maîtriser le flux migratoire.» Et de citer la première partie de la célèbre phrase de Michel Rocard sur la «misère du monde» que la France ne peut pas accueillir.
Pour finir en beauté, il en rajoute dans le cliché de l’immigré fraudeur, en déclarant souhaiter qu’on évalue les «droits et prestations auxquels ont aujourd’hui accès les étrangers en situation irrégulière». Car, assure le président de République, une «situation irrégulière ne peut conférer plus de droits qu’une situation régulière».
http://www.liberation.fr/politiques/0101649832-sarkozy-degaine-les-cliches-et-cible-les-immigres